La Croisière s'amuse... par Alain

      Du 10 au 18 avril, un groupe de croisiéristes miliTantes se sont embarquées sur un paquebot imaginaire. Une petite quinzaine de marins sans capitaine a tenté de retrouver ses identités. Cette réunion extra spatiale, extra temporelle de gays libertaires, de pédés anars, de punks, ou squatters, de queers, de tapins, de Tantes Acharnistes (comment nous définir…?) Francophones fût de construction collective. En effet, nous avons du créer et vivre un lieu que nous avons fait nôtre pour un temps donné.

      La Croisière II a navigué en Jura suisse. Elle était la deuxième édition d’une première tantative qui eut lieu en septembre 98 dans la banlieue bruxelloise. La Croisière est l’occasion de nous rencontrer, homosexuels, hommes engagés dans des luttes anti-patriarcapitalistes au sein d’associations, de clubs radicaux, d’organisations politiques. La dynamique engagée lors des deux premières éditions nous conduit déjà à l’organisation d’une troisième Croisière pour l’automne prochain, et, ce à un rythme semestriel.

      Ce moment privilégié a été l’occasion de travailler en atelier sur notre histoire collective, sur nos enfermements, nos ghettos, sur notre sexualité et la société marchande, sur nos ruptures et nos liens, sur nos luttes parallèles et à venir !

      L’énergie motrice de cette croisière fut dans la gestion collective de cette semaine, où nous sortions, pour un temps, de la pression de normes embastillantes pour établir des règles que nous apprîmes à transgresser.

      Les gestes du quotidien (ménage, cuisine, vaisselle…) n’étaient pas vus comme un travail mais comme une activité où le jeu n’était pas absent. En créant collectivement ce lieu de vie et de parole, et grâce à l’attention de l’autre, des autres, nous avons pu retrouver des parts de nos identités. Les jeux de réflexion nous ont permis de redécouvrir des émotions, des lieux de sensibilités oubliés, des lieux de souffrance tues. Chacun, selon sa volonté, son rythme, a ainsi pu, par une défense politique collective, redéfinir son entité.

      C’est par une multitude de gestes, d’attentions, d’écoutes que des jeux se sont mis en place. Le jeu, espace libre entre les individus, lieu de transition permit la réaffirmation du je.

      Cette période de réassurance, de redécouverte du moi devait se continuer lors de nos sorties par le jeu de l’attitude, de la tenue. Le vêtement est notre enveloppe sociale. Il est le témoin de nos fatigues, de nos désirs, de nos révoltes, de nos attentes. Il est aussi l’expression de ce que nous voulons livrer aux autres, transition entre l’intime et le social.

      Pour ne pas rester médusés sur notre radeau, nous avons établi des liens avec d’autres combats, d’autres désirs. Ainsi les derniers jours de La Croisière II nous ont donné l’occasion de rencontrer nos homologues germanophones.

      Ceux-ci ont, depuis six ans, lancé une initiative similaire à La Croisière, Homoland. Elle a vu le jour dans les milieux gays anars de Berlin à partir de 1990 (cf. StarH). La Croisière a puisé dans cette expérience ses premières influences.

      Le vendredi 16 avril, à Bern, fut organisée une fête de soutien au fanzine Tuntentinte, réalisé par Homoland. Ce rendez-vous de fêtards regroupait donc Homoland, La Croisière et le carré lesbien et gay militant de Bern, et nous permit de poser des faits tard dans la nuit. La fin de La Croisière coïncide avec le début d’Homoland et nous finîmes notre séjour en Suisse dans le chalet alpin où commençait Homoland.

      Après cela, nous avons rendez-vous dans les luttes, lors de Lesbian & Gay Pride, lors de débats, dans des actions culturelles, dans des campagnes d’affichage … dans nos rires et nos pleurs. La vie en rose et noir !

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