Revue littéraire

Ouf, enfin un roman comme on aimerait en lire plus souvent!
Enfin un roman pour les folles, les Tapioles révolutionnaires et délurées et autres anormaux-ales qui ne se retrouvent pas dans la masse de bouquins traitant de l'hétéro ou de l'homosexualité. Ces bouquins qui nous rabâchent toujours les mêmes choses, nous énervent et nous ennuient a mourir parce qu'ils forment la littérature normâle d'aujourd'hui.
Moi, j'ai carrément adoré ce livre, écrit à la première personne (ça fait encore plus authentique!), qui vous apparaîtra sans aucun doute comme une bouffée d'oxigène au milieu des fictions disponibles sur le marché de la littérature bien-comme-il-faut et vous procurera une réelle jouissance intellectuelle (si, si!!). Je peux vous assurer que cette lecture vous fera autant de bien qu'une séance chez une esthéticienne renommée. C'est dire...!!
Dans "La vie Rêvée de Sainte Tapiole", on suit les périples d'un jeune tante qui a un faible pour les garçons aux jambes arquées depuis sa naissance jusqu'à ses 20 ans, depuis ses premières expériences de pédé aux Etats-Unis jusqu'à ses actions terroristes de pédale enragée à Paris (qui sont d'ailleurs un vrai régal). On vit avec elle ses névroses délirantes, ses peurs, ses questionnements, ses amours et ses histoires de cul. Le tout enrobé dans une conscientisation politique qui fait plaisir à lire.
Bien sûr, on a tendance à s'identifier à l'héroïne mais c'est parce qu'au delà de l'histoire de ce personnage, le livre parle aussi de cette histoire commune à toutes les Tapioles et qui est proche de nous. Il y a plein de thèmes abordés comme par exemple l'image du prince charmant, la bisexualité, les violences homo/lesbophobes, les amours pour les garçons, la radicalité sexuelle et la haine d'une société hétéro qui visiblement emmerde et l'auteur et l'héroïne.
Tout ça fait de ce bouquin un roman délicieusement non-normal raconté avec un humour et un cynisme qui, j'en suis sûr, fera plisser votre lifting plus d'une fois. Bref ce roman hypeeer drôle est un réel bonheur et on a vraiment les boules quand ca s'arrête.
A lire et à relire quand vous n'en pouvez plus des heter@s qui gravitent autour de vous. Ca vous donnera peut-être des idées radicales pour y remédier!
Je n'aime pas trop résumer les livres (vous n'avez qu'à le lire!) donc pour vous donner l'eau a la bouche voici un petit extrait:

"Tous les jours un peu plus, je découvre le bonheur d'être pédé. Si la réincarnation existe, faites que je revienne en folle perdue.(...) Oui, le bonheur d'être pédé, d'avoir le sentiment que toute une gamme de lois ne vous concerne pas. Aimer les garçons aux jambes arquées, les tee-shirts jetés en boules pendant l'amour, l'odeur de la sueur qui mouille les draps, un pied cambré aux orteils larges, la tension des muscles qui dessinent une cuisse, les arrières-salles obscures des bars où se rendent les mecs pour s'envoyer en l'air sans se voir, après une séance de cinéma avec leurs meilleurs copines.(...)
Ce regard décalé sur les choses et les gens parce que plus attentifs aux désirs et aux haines. Ce banquier qui craque sur l'apprenti-maçon et cette folle coiffeuse qui par amour va s'intéresser au tracto-pelle de son amant.(...)
Cette folle serveuse de restaurant qui tout en vous prenant la commande va demander a votre mère le nom de son parfum, ces appartements décorés comme des bonbonnières de foire, ce goût du mélange, cette passion de l'iconoclaste.(...)
Oui, j'aime les tantes parce qu'elles sont gentilles avec les vieilles dames et séduisent toujours la maman de leur petit copain. Médecins le jour, elles se font pisser dessus dès le soir, tourneurs-fraiseurs de huit heures à dix-sept heures, elles se métamorphosent en enculeur cuir le soir venu.
Folles capables de payer très cher un mauvais repas uniquement parce que le serveur, désagréable et hétérosexuel, ressemble à Brad Pitt.
Folles qui conseillent leurs copines de bureau sur la couleur de leur mascara, et qui entre deux séances de pipes au fond du back-room, font salon pour parler du dernier opéra créé.
Folles mauvaises mais jamais sans humour. Folles au-delà des cultures et des rôles voulus pour elles. Les seules capables d'aller à la plage, par trente degrés, en chaussettes de laine blanche et brodequins de haute montagne, parce que c'est la mode, et de trouver cela absolument normal.(...)
Folles insaisissables et prévisibles, folles de liberté, d'envies et de caprices.
Folles, je vous aime."

Voilà, c'est tout. Si vous voulez en lire plus, vous savez ce qui vous reste à faire.
Pour celles et ceux qui n'ont pas de sous et dont les copines ne veulent pas leur prêter le livre, sachez qu'il sera disponible à la prochaine croisière.

Je vous bise.

Rosa

Références:

"La vie Révée de Sainte Tapiole" par Hervé Brizon
Editions Balland, 2000/Collection 'Le Rayon'. 89FF.